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Publié par LeCoureurdeVin

Le lundi 4 novembre au soir, la "bande des quatre", soit les domaines Comte Liger-Belair, Méo-Camuzet, Etienne Sauzet et le Clos de Tart, présentait le millésime 2012 aux Caves Legrand à Paris. Un beau lieu, un beau millésime, de beaux domaines de Bourgogne. On y court !

Pour un amoureux des vins de Bourgogne, en particulier ceux de la Côte d'Or, il n'était pas possible de passer à côté de cet événement hautement qualitatif. Depuis le millésime 2008, ces quatre domaines prestigieux de Bourgogne se sont associés pour présenter une fois par an leur nouveau millésime aux Caves Legrand situées dans l'historique Galerie Vivienne, juste derrière les jardins du Palais Royal.

Millésime rare, millésime cher

Le millésime 2012 est annoncé comme très beau en Bourgogne. Potentiellement, car la saison a été difficile et a nécessité beaucoup de travail de la part des vignerons. Ceux qui ont fait les efforts nécessaires auront produit des vins très qualitatifs. Mais les rendements ont été faibles. Il n'y aura donc pas assez de vin pour satisfaire la demande grandissante, notamment en provenance d'Asie. Ca devrait accroitre la tension sur les prix, déjà très forte.

Gérard Boudot présente les vins du domaine Etienne Sauzet

Gérard Boudot présente les vins du domaine Etienne Sauzet

Après avoir montré patte blanche à l'entrée, on attaque par les blancs du Domaine Etienne Sauzet, domaine historique de la côté de Beaune situé à Puligny-Montrachet. Le domaine porte le nom de son créateur. C'est la troisième génération qui est représentée ce soir-là à travers Gérard Boudot, même si c'est désormais sa fille Emilie qui gère le domaine avec son mari.

Il n'y a déjà plus de Puligny village et on attaque directement par les Premiers Crus. On déguste Champ-Canet et Les Combettes face-à-face. Ce sont deux climats différents bien que situés l'un au-dessus de l'autre au Nord de Puligny. Champ-Canet, le plus haut, possède des sols plus minces et plus calcaires, tandis que, logiquement, on retrouve des sols plus argileux dans Les Combettes juste en dessous, là où la pente devient plus douce. Cette différence se retrouve instinctivement dans les vins. Même si les deux présentent des arômes prononcés de citron, Champ-Canet est plus vif, plus sur le zeste, tandis que Combettes est plus riche.

Le Bâtard-Montrachet, Grand Cru, entièrement situé côté Puligny (qui partage ses Grand Crus avec Chassagne-Montrachet), monte encore d'un grand dans l'opulence. On perd le citron pour aller vers les fruits confits. Le vin représente bien la richesse du Bâtard.

Beaucoup de rouge mais pas de bonnet chez Méo-Camuzet

Beaucoup de rouge mais pas de bonnet chez Méo-Camuzet

On passe en Côte de Nuits pour goûter la production de deux domaines emblématiques de Vosne-Romanée. Le Domaine Comte Liger-Belair et le Domaine Méo-Camuzet possèdent des terroirs similaires, mais il est intéressant de goûter leurs vins simultanément car les styles sont assez différents.

Le charme discret de la bourgeoisie

On rencontre Jean-Nicolas Méo pour la première fois. Il correspond à l'idée que l'on s'en faisait. Vêtu d'un pull rouge, la mèche soigneusement rabattue, il possède la réserve naturelle de la grande bourgeoisie. Sans que l'on puisse présager s'il s'agit d'une éducation, d'un caractère, ou de la combinaison des deux, Jean-Nicolas Méo impose immédiatement une certaine distance, plus typée bordelaise que Bourguignonne. Il ne s'agit pas de cette méfiance scrutatrice de l'homme de la terre mais d'une sorte de réserve qui peut déconcerter, même si on la sent bienveillante. On parlerait de politesse plus que de froideur.

Le domaine présente quatre vins qui donne une idée du style du domaine. Le Clos Saint-Philibert, un Hautes-Côtes de Nuits blanc, est très expressif et riche. Le Gevrey-Chambertin est un vin issu du négoce que Jean-Nicolas a monté avec ses soeurs. L'une d'elle le rejoint d'ailleurs juste à ce moment-là, obligée de faire quatre bises à un caviste peu au fait des us et coutumes des beaux quartiers. Le Gevrey s'avère structuré mais reste assez fin. Le bois se fait sentir mais n'écrase pas les arômes de cerise du fruit. Ces vins ne sont de toute façon pas encore en bouteille. Ils finissent à peine leurs fermentations malolactiques et ne sont donc pas encore prêts à boire.

On retrouve la puissance caractéristique du domaine avec les deux vins suivant, un Nuits-Saint-Georges Premier Cru Aux Boudots et le Clos Vougeot. Les deux vins sont denses et le boisé très présent, surtout dans le Clos Vougeot qui sèche. Même si le domaine a, semble-t-il, assoupli son style, les vins restent sérieux et puissants. On leur donne rendez-vous dans quelques années quand ils seront à leur optimum.

Echezeaux au garde-à-vous devant son propriétaire

Echezeaux au garde-à-vous devant son propriétaire

En face, Louis-Michel Liger-Belair porte l'uniforme, en l'occurrence un pantalon rouge fané qu'il semble ne jamais quitter. Il est lui aussi issu d'une grande lignée de la côté de Nuits.

Les Grandes Familles

C'est le Général de Division Louis Liger-Belair, originaire de l'Aube, qui a créé une dynastie au début du XIXème. Il s'est illustré sur les champs de bataille, notamment à Iéna, ce qui lui valu bien des honneurs, mais c'est son épouse, Claire-Cécile Basire, qui lui a ouvert les portes du vignoble bourguignon. Leur fils adoptif, Louis-Charles Bocquillon Liger-Belair renforcera la prestige de la famille en épousant en 1834 une fille Marey-Monge, alors la famille la plus puissante de la région.

Au fil du temps, le capital de vignes s'est amoindri, mais Louis-Michel Liger-Belair, 40 ans tout juste, lui même fils de militaire, s'est attelé à reprendre le domaine. Il a réussi en une dizaine d'années à le propulser au firmament des grands vins bourguignons. Bravo !

Doué de l'aisance des gens bien nés, il s'avère d'un naturel chaleureux. Très direct et franc, on serait tenté de voir derrière ce style "no nonsense" le côté assez droit d'une éducation militaire, la rigueur n'empêchant pas la chaleur.

Bouteilles après la bataille

Bouteilles après la bataille

S'il n'y a déjà plus de Clos du Château, son village le plus haut-de-gamme, issu de vignes plantées dans l'ancien potager du château de Vosne, on commence par le nouveau vin du domaine, Le Clos des Grandes Vignes, situé au sud de Nuits-Saint-Georges. C'est un Monopole étrangement placé en-deça de la route nationale, une incongruité pour un Premier Cru. Le vin s'avère extrêmement suave et rond, sur des notes de cerise. Il est déjà très gourmand.

Le Vosne-Romanée Premier Cru Aux Reignots, emblématique du domaine, nous déconcerte. Il fait preuve d'une belle complexité sur laquelle on n'arrive pas à mettre les mots justes. L'Echezeaux s'avère plus massif, le bois dominant un peu le jus à ce stade. Là encore un vin en devenir. Le domaine produit globalement de très beaux vins, désormais très recherchés, le marché s'en étant emparé, faisant monter les prix de façon drastique.

Bulle spéculative dans un grand vin de Bourgogne

Bulle spéculative dans un grand vin de Bourgogne

Plus de Clos de Tart ni de Sylvain Pitiot, le célèbre régisseur du domaine, quand on arrive à la dernière table. De même qu'il est désormais trop tard pour goûter les millésimes plus anciens présentés. Reste que cet aperçu du millésime 2012 nous a donné le sentiment que les grands domaines bourguignons proposeraient des vins de belle qualité sur ce millésime.

2012, plus cher que sunny...

Mais on sait déjà que les quantités réduites accentueront la pression de la demande et donc la pression sur les prix. Les vins de ces domaines sont déjà extrêmement chers. Le Clos de Tart est ainsi passé de 100 à 300 Euros en 5 ans. On ne parle même pas de La Romanée de Liger-Belair qui s'est envolée vers la stratosphère.

Jusqu'à quand le marché suivra ? Il est en tous cas certain que si la demande asiatique semble rester frénétique, beaucoup de clients européens risquent de décrocher, si ce n'est pas déjà fait. Un sujet en soi. On y reviendra...

Pour l'heure, on conclut cette soirée dans l'ambiance festive du beau restaurant Beaucoup qui accueille la Maison des Vins de Tain l'Hermitage. En compagnie de Miss Winebubble on goûte quelques Crozes-Hermitage épicés de la trentaine de vignerons présentés, parlant à droite à gauche avec un ancien camarade de lycée devenu acteur à succès et la moitié des Caves Bosseti. La récré en somme, avant de rentrer.

Nature morte au Crozes-Hermitage se perdant dans la nuit

Nature morte au Crozes-Hermitage se perdant dans la nuit

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