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Publié par LeCoureurdeVin

Suite de nos aventures bourguignonnes avec la rencontre de deux vignerons emblématiques de la Côte des Beaune. Le discret trentenaire Thibault Morey, pas encore complètement dans la lumière, à Chassagne-Montrachet et le plus capé Jean-Marc Roulot à Meursault, déjà connu du monde entier.

C’est le funeste vendredi 13 novembre qu’on a rendu visite à ces deux vignerons. Mais la journée avait commencé calmement dans cette Bourgogne viticole qui se lève tôt. Rendez-vous était pris au domaine Morey-Coffinet à Chassagne-Montrachet où m’attendait Thibault Morey.

La première fois qu'on s'était rencontré c’était en avril 2012 à Paris. A l’époque Fabrice Amiot avait créé une association des amis de Chassagne-Montrachet à l'occasion de la Saint-Vincent tournante qui s’était tenue dans le village. Deux fois par an il faisait monter un collègue vigneron à la capitale pour une régustation. L'occasion de se rencontrer chez lui, dans un cadre intime.

Thibault était donc venu. On avait déjà entendu parler des vins qu’il faisait avec son père, qu’il épaule depuis 2000. On se souvient d’un jeune homme assez beau, plutôt réservé, très calme, qui dégageait quelque chose de l'ordre de la sérénité. Il nous a tout de suite intrigué, mais on a deviné qu’il se livrerait moins facilement que ses vins. D’une certaine façon on s’était trompé.

Thibault Morey écoute la musique de ses vins... avec son nez !

Thibault Morey écoute la musique de ses vins... avec son nez !

Thibault Morey, l'homme qui apaise

On le retrouve donc ce matin du 13 novembre et il nous accueille comme si on l’avait toujours connu. Décontracté, en pull col en V bleu marine, c’est comme s’il n’avait pas bougé, comme si la vie n’avait pas (encore) prise sur lui. On l’avait contacté quelques temps auparavant, le temps d’échanger sur les dates de vendanges de ce millésime 2015 qui ont fait couler un peu d’encre du côté de Meursault.

Thibault est là, devant nous. Il est très simple de contact, très franc et direct dans ses explications, mais c’est comme s’il n’était pas complètement là non plus. Musicien à ses heures, il a fait 10 ans de piano, on se demande s’il n’entend pas une mélodie alors qu’on est avec lui. Ou peut-être est-il juste attentif à la musique de ses vins.

 

Ca n'est pas une partition mais une analyse chromatographique pour suivre la fermentation

Ca n'est pas une partition mais une analyse chromatographique pour suivre la fermentation

2015, un millésime de vins gourmands et pleins

On commence par goûter les 2015 sur fûts. Ca n’était pas prévu, mais comme on est curieux de découverte et d’apprentissage, il se prête au jeu avec nous. Les vins sont encore des bébés, on les saisit dans cette sorte de prime-enfance qui ne permet pas encore de juger complètement de leur avenir, mais permet de déceler des traits de caractères, un début de personnalité. Quand on lui demande s’il a un style, il nous répond qu’il recherche le meilleur équilibre et qu’il aime l’élégance. Des 8,5 hectares du domaine, que Thibault supervise avec son père Michel, récent sexagénaire, on commence à tirer quelques généralités sur ces 2015.

Les Chassagne se montrent plutôt fins, avec un côté acidulé et pierreux, en particulier le 1er Cru la Romanée, même si les parcelles situées sur la partie Morgeot, antérieurement entièrement dévolue aux rouges, donnent des vins généralement plus riches. D’ailleurs le domaine continue de produire des rouges qui nous ont globalement fait une excellente impression.

Le village de blancs qui n'a pas à rougir de ses rouges

Meursault et Puligny ont focalisé la réputation de ce coin de Côte de Beaune grâce à l’excellence de leurs blancs. Chassagne-Monrachet, qui produisait les deux couleurs mais était majoritairement planté en rouge au sortir de la guerre, a suivi le mouvement et se retrouve désormais surtout identifié pour ses blancs. Mais il reste une partie conséquente de rouges, malheureusement pas assez valorisés par le village… et sans doute pas vendu assez chers pour inciter les vignerons à les mettre en avant. 

Pourtant ceux goûtés ce jour au domaine Morey-Coffinet nous ont fait excellente impression et sont d’un rapport qualité-prix intéressant. D’ailleurs Thibault, qui en Bourgogne n’a pas besoin de chercher loin pour trouver des maîtres ès pinots, a également passé 2 mois chez Ken Wright, un des vignerons cultes de l'Oregon aux USA. A bon entendeur…

Le caveau du XVIème Siècle du Domaine Morey-Coffinet invite au recueillement

Le caveau du XVIème Siècle du Domaine Morey-Coffinet invite au recueillement

Dans le secret de la cave voutée

On goûte alors les 2014, généralement pas encore en bouteille, au calme, sur une table qui semble minuscule dans cette magnifique cave voutée qui incite au recueillement. Thibault nous explique comment se passe sa collaboration avec son père, qui lui passe tranquillement le relais et avec lequel il travaille en bonne intelligence. Thibault est en charge des vinifications depuis 2005. C’est lui qui a peu à peu amené le bio, mais sans jamais brusquer les choses, pour que les  transitions se fassent en douceur. Ils ont finalement demandé la certification Bio à Ecocert qui la délivrera en 2018. Thibault s’essaie à la biodynamie, mais là aussi calmement. Avec mesure, et cette sorte de délicatesse qu’on ne retrouve pas seulement dans ses vins mais aussi dans ses manières.

Le Clos Saint-Jean et Morgeot 2014, les deux rouges, sont beaux. Ils sont à la fois très fermes et encore stricts, tout en étant très fins. Un bon exemple de ce que le pinot noir peut donner de meilleur dans ce sud de la Côte de Beaune.

On goûte et on parle, calmement, des vins du domaine

On goûte et on parle, calmement, des vins du domaine

Les blancs de 2014

On attaque les blancs avec le Bourgogne générique. S’il présente de légères notes beurrées, il s’exprime avant tout sur la tension et le citron. Un Saint-Romain de négoce dont le domaine fait 20 à 25 pièces le suit. Le registre est sensiblement différent. Il embaume l’acacia et se montre plus enrobé que son prédécesseur. Le Chassagne-Montrachet produit sur le climat des Houillères (sous le Bâtard-Montrachet) est assez réservé à ce stade mais sa bouche est doucement caressante. On monte d’un cran avec le 1er Cru Cailleret qui est très fin, tout en tension, et dégage cette sensation saline ou pierreuse qui donne de l’allonge aux vins blancs.

On enchaîne avec le 1er Cru la Romanée, notre petit préféré de la gamme, celui qui nous a amené vers le domaine. Ce climat est certainement un des meilleurs de Chassagne. On le trouve également chez quelques rares vignerons comme Vincent Dancer, Fontaine-Gagnard et Bachelet-Ramonet. Le nez est explosif avec des arômes citronnés et toujours ce côté salin qui nous rappelle le calcaire. La bouche est fine et élégante. Mission réussie.

Derrière le Morgeot-Fairendes s’exprime dans un style beaucoup plus exubérant et riche. La bouche offre plus de volume et de gras, mais du coup semble plus plate. On retourne vers le citron et la tension avec le Puligny-Montrachet 1er Cru les Pucelles. Belle droiture qui prolonge le vin en bouche. Nouveau changement de rythme avec le Grand Cru de la cave, le Bâtard-Montrachet qui s’exprime sur la richesse et présente un gros volume de bouche. Son avenir semble assuré.

On quitte presque à regret Thibault dont la présence pendant 2 heures nous donne l’impression d’avoir fait une séance de yoga plutôt que de dégustation. A la fois apaisant et prévenant, on ne doute pas que cette quiétude se transmet à ses vins, qui sont du coup apaisés et fins, quasiment réconfortants.

Vous l’aurez compris, on vous recommande les vins du Domaine Morey-Coffinet qui, s’ils ne sont pas donnés, Bourgogne oblige, restent très accessibles pour ce niveau de qualité en Côte de Beaune.

Domaine Morey-Coffinet 6 Place du Grand Four 21190 Chassagne-Montrachet 

Mail : morey.coffinet@wanadoo.fr

 

Pour la suite de nos aventures avec Jean-Marc Roulot c'est

Le début du voyage avec la dégustation des vins de Gevrey-Chambertin 2014 ici

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